La narration auto-biographique va au-delà du simple récit intérieur. Chez les adolescents qui présentent des troubles psychiques sévères, il y a une construction plus ou moins délirante dont le but est d’organiser une structure prothétique ou grandiose pour le narcissisme. Reconstruire les moments de la vie peut être une tentative de réparer des sentiments de dispersion. L’autobiographie recréée dans l’analyse peut alors représenter une réinvention de soi.
À partir de la distinction freudienne originaire entre sujet du moi et objet du moi et donc entre pôle subjectal et pôle objectal, la subjectalité est conçue comme le processus permettant l’émergence d’un soi créatif et autonome, éclairant, à travers leurs perturbations, certains aspects essentiels du cadre et du contre-transfert conditionnant la possibilité ou non d’un véritable travail psychanalytique.
Cet article se veut être une réflexion clinique sur l’acte de prostitution et les enjeux psychiques qu’il met en scène. Un retour sur l’histoire des hypothèses de recherche et des moments forts permet de souligner combien le repérage de l’anamnèse et des traumatismes est insuffisant pour comprendre le destin prostitutionnel. L’écoute de la clinique m’a amenée à prendre en compte la force des mots ayant valeur d’injonction comme le “ Tu n’es qu’une prostituée ” ou le “ Je suis une prostituée ” fabriqué par le sujet lui-même. C’est dans ce contexte de sensibilité aux mots que la fonction du “ quatrième personnage ” s’est déployée, comme figure d’un Autre social féminin à qui s’adresserait l’acte de prostitution et de ce qui s’y joue pour le sujet. En effet, et telle est notre hypothèse de recherche, l’érotologie de certaines passes participerait d’une construction de soi à travers des éprouvés auto-érotiques autour des orifices du corps et de ce que la psychanalyse appelle l’objet petit a. Comme l’indique ce que nous avons décrit de “ la passe symbolique ”, l’amour n’est pas absent d’un tel processus de subjectivation.
Que les coordonnées sociologiques d’un certain état d’incertitude nous forcent à un effort d’herméneutique portant sur une subjectivité destinée à devenir publique, et que, cédant au mouvement d’intériorisation de la responsabilité, nous soyons délivrés de la culpabilité qui entrave autant nos actes que notre action, le constat que porte A. Ehrenberg sur le travail contemporain d’adolescence, s’il est prometteur, semble laisser dans l’ombre les aspects plus douloureux que sont l’angoisse de culpabilité dont le pendant est le travail du fantasme.
Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 595-601.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7