Michael Jackson figure une adolescence éternelle, rejoue le scénario d’une individuation pénible et inaccessible. Ses métamorphoses se font l’écho des transformations psychiques et physiques des jeunes pubères. Son mythe fortement imprégné de ruptures généalogiques, évoque un personnage en prise avec un puissant désir d’auto-engendrement. Son polymorphisme maximise les possibilités identificatoires des adolescents, et sa médiagénie favorise son appropriation sur le mode de la revendication sociale. Sa capacité à incarner la toute-puissance le place comme un formidable support de projection, faisant écho aux désirs narcissiques des jeunes.
En analysant le clip« Thriller »de Michael Jackson, nous proposons une discussion de la métamorphose adolescente. Par une extraordinaire fiction de soi liant des références cinématographiques au mythe et à la science-fiction, il démontre, en un geste postmoderne radical et transgressif, l’inanité des oppositions telles que homme-femme, ange-démon, homme-animal, vivant-mort, réalité-fiction – autant de couples dont il fait voler en éclats le pouvoir structurant. Que dire d’un corps dont la fonction première semble avoir été de passer de transformation en transformation, de se métamorphoser en de toujours nouveaux dépassements héroïques, pour rejouer la métamorphose adolescente qui est marquée, ici, par une négativité tragique ?
Adolescence, 2013, T. 31, n°4, pp. 965-977.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7