Dans Les poétiques du corps, Sylvie Le Poulichet poursuit son exploration des registres cliniques de l’informe ou de l’impersonnalité. L’accent est ici porté sur le rôle des terreurs archaïques et sur les défauts de transmission à propos des origines, lesquels vont tantôt être la cause de défauts de « prise de corps », tantôt être à l’origine d’identifications d’angoisse ou encore être responsables de la création de théories fantastiques à l’adolescence.
À partir d’étranges formations sensorielles et de théories d’allure délirante dans certains passages adolescents, sont présentées les notions de « créations d’enveloppes sensorielles paradoxales » et de « théories fantastiques de l’adolescence ». Le recours à la sensorialité n’est ni un déficit ni une régression, mais une création paradoxale – protectrice et persécutrice – qui permet d’élaborer dans le transfert les traces refoulées du sexuel infantile inconscient, articulées aux compositions corporelles et fantasmatiques propres à l’adolescence.
En sous-estimant l’importance de la relation affective de la mère au corps de l’infans pour la suite du développement, les théories psychanalytiques oublient le rôle majeur du corps comme « dimension vitale de la réalité humaine ». L’auteur établit une distinction entre l’image du corps comme structure fondée sur des expériences sensorielles et le corps comme objet interne, qui inclut le corps érotique et qui a pour fonction d’assurer une base solide au développement du moi et son rapport à la réalité. Les parties du corps liées à des expériences de douleur, à la déprivation ou à l’absence de contact ne peuvent être introjectées et demeurent clivées du corps objet interne, occasionnant des troubles du développement qui peuvent aller jusqu’à des perturbations graves du lien à la réalité.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7