À partir de l’étiologie traditionnelle de la maladie mentale en Afrique Noire, l’auteur interroge la notion » d’enfant ancêtre » dans l’interprétation des troubles mentaux chez les adolescents africains de la première génération en situation de migration. À partir d’une lecture ethnopsychanalytique de deux cas cliniques, l’auteur met en évidence la réintroduction de la fonction symbolique du père, fondée sur cette étiologie traditionnelle, au sein de deux familles exposées à l’acculturation. L’auteur démontre l’efficacité thérapeutique de cette méthode ethnopsychanalytique qui a permis à ces deux adolescents de se soustraire au déni de filiation attribué par cette logique culturelle pour ne pas être » sacrifiés » à leur statut » d’enfant ancêtre « .
Beginning with a reflection on contemporary cultural mixing, the author will analyze this issue as it relates to second-generation immigrant children and their parents. Using some clinical examples of children and their parents received in a Pschological Service for immigrants, she reflects upon the trauma of migration and on the non-elaborated secrets which are passed down to the next generation. Also she raises the question of cultural counter-transference, a central factor in preventing fallout within the therapeutic relation, and analyzes the creative potential of second generation adolescents.
Couldn’t adolescence be a metaphor for « migration », with the world of childhood as the native country and adult world the promised land ? Should not the various « passages » then be examined from a topological perspective ?
This article suggests that the them of migration be considered as a metaphor for an interior psychical operation : the subjectalizing differentiation from the primary objects, which play a decisive role in adolescence. The issue of the subject is treated within a dialogue with sociologists, anthropologists, historians and philosophers, to the point of envisioning a plural subject open to the diversity of libidinal economies – characterized by the omnipresence of psychical bisexuality and infantile sexuality, here related to gender theory.
Migration introduces one to mixing – ethnic, cultural, but also psychical. A clinical example of adolescent psychical disorder generating elaboration and symbolization of interior strangeness illustrates the hypothesis : we are all migrants.
L’auteur, partant d’une réflexion sur le métissage contemporain, s’arrête sur l’analyse de la question relative aux adolescents de la seconde génération et de leurs parents. À travers quelques exemples cliniques d’enfants et de leurs parents écoutés dans un Service Psychologique pour familles émigrées, elle réfléchit sur le trauma migratoire et sur les secrets non élaborés qui se transmettent dans les générations suivantes. Elle pose de même la question du contre-transfert culturel, élément central pour ne pas causer de dégâts dans la relation thérapeutique et analyse la potentialité créative des adolescents de seconde génération.
L’adolescence ne serait-elle pas une métaphore de la « migration » avec une contrée d’origine, le monde de l’enfance et sa terre promise le monde adulte. Les différents « passages » ne sont-ils pas dès lors à interroger avec une dimension topologique ?
Cet article propose de considérer le thème de la migration comme la métaphore d’une opération psychique intérieure : la différenciation subjectalisante avec les premiers objets, qui se joue de façon décisive à l’adolescence. La question du sujet est reprise dans un dialogue avec les sociologues, les anthropologues, les historiens et les philosophes, jusqu’à envisager un sujet pluriel ouvert à la diversité des économies libidinales – caractérisée par la prégnance de la bisexualité psychique et du sexuel infantile, ici mis en regard avec la théorie des genres.
La migration introduit au métissage, ethnique, culturel, mais aussi psychique. Un exemple clinique de trouble psychique adolescent générant l’élaboration et la symbolisation d’une étrangeté interne illustre l’hypothèse : nous sommes tous des migrants.
Adolescence, 2013, T. 31, n°3, pp. 661-672.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7