Les êtres humains ont une compétence naturelle à élever des enfants, sinon l’humanité n’existerait plus. Il est vrai cependant que l’évolution sociale récente rend cette fonction plus complexe sinon plus difficile. La libéralisation de la société occidentale a fait perdre en partie un certain consensus sur les règles éducatives qui s’interposait en tiers entre les désirs des parents et ceux des enfants. Cette perte, bénéfique à bien des égards, a l’inconvénient de susciter un rapproché de type incestuel entre les partenaires et de favoriser un investissement narcissique entre eux, brouillant les limites. Ce qui différencie l’enfant et l’adolescent est alors ce qui échappe au désir des parents c’est-à-dire tout ce qui est de l’ordre de l’opposition, de l’insatisfaction, de la provocation et potentiellement de la destructivité. « Ça c’est moi » peut dire le jeune parce que cela met l’adulte en échec et dans l’impuissance et permet au jeune d’échapper à l’angoisse d’abandon parce qu’il inquiète et à l’angoisse de fusion et d’intrusion que pourrait susciter le plaisir partagé.
Il ne faudrait pas cependant que cette invitation faite aux parents à « comprendre » leurs relations émotionnelles avec leurs enfants les paralyse dans leur action et dans leur spontanéité et renforce une situation d’attente à l’égard des enfants auxquels il serait demandé de dicter leur éducation à leurs parents, dont ils prendraient en quelque sorte la place. Il apparaît plus favorable de libérer leur confiance en leur capacité d’être parent tout en les dissuadant de vouloir tout contrôler et de se culpabiliser dès qu’une difficulté surgit ; Par contre toute difficulté durable qui empêche le jeune de se nourrir de ce qui est nécessaire à son développement et renforce ainsi une dépendance pathogène à l’adulte et la nécessité de s’opposer pour se différencier au détriment du développement de ses compétences appelle à la fois une limite ferme posée par les parents au comportement destructeur et une ouverture à des tiers pour sortir de la confrontation stérile.