Les confinements liés au Covid-19 ont entraîné une forte augmentation des hospitalisations pour anorexie sévère chez des adolescents. Si le tableau clinique était typique, l’investissement de l’hospitalisation et des soins était très inhabituel. L’investissement d’un espace à soi, a permis la reprise d’un travail de frontière entrainant la restauration de la différenciation réalité/fantasme, la reprise d’un processus d’appropriation subjectale et la mise à distance de l’effraction traumatique et la régression orale induites par la pandémie.
Cette dernière décennie plusieurs adolescents français se sont identifiés à l’idéologie violente prônée par Daesh et ont tissé des liens avec certains de ses membres. De ce fait, plusieurs d’entre eux sont suivis en psychothérapie dans le cadre d’une obligation de soin judiciaire. À partir de la prise en charge de cinq de ces adolescents, nous proposons de considérer que cette identification peut représenter une « solution radicale » face à la terreur d’être agressé.
Le récit de quelques moments de la cure d’une adolescente présente comment les figures de l’agression suivent les vicissitudes d’un « sexuel » dont on interroge les formes changeantes en particulier dans leur réorganisation entre enfance et adolescence. Le transfert y fomente des jeux et des pièges qui convoquent l’analyste en des modalités de présence très diverses. Dans le même temps que la patiente veut faire l’adulte en s’identifiant à l’agresseur, c’est bien l’enfant qu’elle fut qui demande très fréquemment à être entendue.
L’auteure évalue ici les incidences dans la cure des premières expériences sexuelles des adolescents. Ces premières relations mobilisent des fantasmes d’agression car le lien entre sexualité et destructivité s’y incarne de façon privilégiée, même quand elles sont librement consenties. L’auteure fait l’hypothèse que la violence du sexuel infantile y est prégnante, réactivée par le caractère traumatique que revêt immanquablement la première relation sexuelle du fait de sa nouveauté radicale.
À partir de fragments de cure pendant la période de pandémie, l’auteur interroge l’articulation entre l’attaque interne de la pulsion, et celle, externe, d’évènements collectifs partagés par le patient et son thérapeute. Ces évènements collectifs récents peuvent entrer en résonnance avec certains processus adolescents alors marqués par « le saboteur interne » et la compulsion de répétition. Il s’agirait d’instaurer un espace transitionnel où le fonctionnement psychique apparaît comme un personnage tierce dont il est possible de discuter à deux, le temps nécessaire.
Adolescence, 2022, 40, 1, 53-67.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7