La question de la haine et de l’adolescence est vue comme un jeu de miroir : d’un côté, la haine que peut ressentir l’adolescent et qui peut être une haine de l’autre comme une haine de soi ; de l’autre côté, la haine dont l’adolescent peut être la cible, la haine contre les adolescents.
Pour ce qui est des « modèles adultes », l’accent peut être mis sur deux aspects différents, même s’ils sont souvent liés. Il y a ceux qui nous sont activement et personnellement présents comme ce sera le cas pour cet instituteur qui changera le destin d’Albert Camus (et dans ce cas, cet aspect était fortement lié à celui de savoir tenir sa place). Mais il y a aussi les modèles qui, sans forcément intervenir directement dans nos vies, le deviennent en sachant d’abord et avant tout tenir leur place. Pour illustrer ces aspect des choses, nous avons choisi deux épisodes de l’histoire de Moïse : l’un où il reçoit sa place d’adulte de son beau-père Jethro, l’autre où il devient « modèle relationnel » pour son peuple lors de la traversée du désert, en se soumettant lui-même à la loi de l’échange.
Devenir adulte impose la confrontation au second temps du conflit œdipien, dans une séquence qui implique la prise de distance avec les premiers objets d’amour et de haine. De la qualité du travail psychique sur le lien aux objets, tout au long des étapes qui vont de la latence à la post-adolescence, dépend l’issue de l’accès à l’âge adulte et aux processus de sublimation. Une recherche portant sur l’élaboration de la position dépressive à l’adolescence, à partir du Rorschach et du TAT, montre que cette élaboration ne devient possible qu’à partir de la grande adolescence.
Commencer sa vie d’adulte représente un véritable tournant psychique qui met le moi à l’épreuve d’un certain désenchantement, à celle de la perte d’un objet d’amour infantile. L’expérience du rêve exerce à cette période singulière, une fonction essentielle s’offrant comme une voie intérieure, la voie royale vers un retour à des sources pulsionnelles et inconscientes; celle d’un dégagement dépressif.
Des pensées ou motions de pensées censurées le jour, se visualisent en rêve, l’expérience autorisant sous couvert d’une certaine déformation, leurs transposition en images qui sous le coup d’une nouvelle transformation par leur mise à jour au réveil vont se redistribuer, s’insérer au moi et à la vie psychique dont ils élargissent les limites
La cure des sujets dits adultes est souvent ponctuée de références à un temps qu’ils situent comme leur adolescence. Nous partirons d’un postulat : le moment adolescent pourrait se définir comme le temps de la refonte du fantasme infantile. Le travail psychique de l’adulte en devenir pourrait alors s’appréhender comme le moment de vérification de cette construction remodelée. Il s’agirait d’en tester la solidité ou au contraire d’en mesurer les ratages afin de tenter une nouvelle construction. Nous en rendrons compte à travers trois vignettes cliniques.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7