Archives de catégorie : Inconsommable – 2008 T. 26 n°4

Anne Bourgain : enjeux de la signature à l’adolescence

La signature est un acte complexe qui participe de la trace et de son effacement. Entre mimétisme et affirmation de soi, elle permet d’aborder la question du nom chez l’adolescent. Par extension, nous explorons d’autres modes de signature à l’adolescence en interrogeant la pertinence de cette désignation : on est en droit de se demander s’il s’agit encore de signature. Qui signe à l’adolescence ? Dans quelles mesures les divers modes d’expression qui sont souvent des pratiques de l’écart viennent-ils « signer » quelque chose du sujet ? Surtout, ce travail tente d’illustrer la façon dont les fantasmes auto-fondateurs peuvent à la fois favoriser et entraver le travail de subjectivation, et partant, permettre ou non le passage.

 

Eric Bidaud : L’adolescent et l’invention de sa signature

Les relations entre le processus adolescent et le rapport au langage se jouent en particulier par un certain « remodelage » du langage au travers des inventions graphiques des adolescents et un nouvel investissement des formes écrites. C’est dans l’invention de sa signature que nous situons un acte essentiel de la ré-écriture de l’adolescent par lui-même, pour le dire autrement, dans l’acquisition d’un style. Il s’agirait d’interroger le statut en mutation du sujet dans son rapport à la signature articulée au nom propre. Cela implique sans doute de préciser la fonction monstrative de la signature et les effets de ses déplacements. Nous pourrions indiquer comme ligne de recherche l’étude de la valeur de signature des marques du sujet au travers de ses formations actuelles : les inscriptions sur le corps propre.

Frédérique Gardien : L’alcoolisme adolescent : prévention ou réduction des risques ?

Peut-on parler de prévention en matière d’alcoolisations adolescentes, quand le risque d’alcoolisme est tout simplement réfuté durant cette période ? La dépendance à l’alcool existe pourtant chez les adolescents, et une véritable prévention ne se conçoit qu’en lien avec un questionnement plus vaste de la consommation d’alcool en France.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 1003-1009.

Marie-Hélène Séguin : De l’objet absent

L’escalade du passage à l’acte autodestructeur survenant à l’adolescence est ici envisagée comme la répétition compulsive d’un trauma ou de micro traumas répétés, survenu(s) durant la petite enfance et qui a (ont) trait à l’absence de l’autre et au sentiment de vide qui en résulte. Les différentes fonctions que peut avoir cette compulsion de répétition sont examinées, notamment en lien avec la quête identitaire à l’adolescence. Finalement, l’auteur aborde la question du travail mental qui est attendu du clinicien dans le travail avec les adolescents chez qui ces enjeux sont présents, particulièrement lorsque la parole ne peut pas être utilisée à des fins de communication intersubjective.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 991-1001.

Jacques Vargioni : Père ne vois tu pas que je saigne ?

L’analyse des mouvements transféro contre-transférentiels de la cure d’une femme obèse permet de mettre en lumière la place centrale d’un événement pubertaire traumatique dans la constitution d’un symptôme boulimique à l’adolescence. Les impasses imposées par cette expérience, après-coup de l’infantile, barrent la possibilité pacificatrice du refoulement conduisant à un renversement/retournement de la pulsion. Ce destin pulsionnel organise une forme mélancolique des scénari originaires dans lesquels le sujet est fautif. C’est alors le corps, comme support du Moi et de l’objet incorporé, qu’il s’agit à la fois d’attaquer et de préserver. Le gavage, mouvement centripète du dehors vers le dedans a également pour but de s’opposer à une fantasmatique de vidage et de séduction potentielle figurée dans le saignement des règles.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 977-989.

Ferruccio Bianchi : La difficulté à devenir femme : une connaissance acquise auprès des adolescentes anorexiques

L’auteur considère que les difficultés que rencontre l’adolescente anorexique à devenir femme constituent les manifestations symptomatiques graves d’un processus de féminisation qui pourrait être commun à tous les enfants de sexe féminin. La future anorexique aurait constitué en tant que fillette, un système de faux-self qui entre en crise lors de la puberté. L’anorexie, processus anti-évolutif entraînant un risque de mort psychique et physique, est une forme de psychopathologie qui recèle aussi un désir inconscient d’émancipation et de subjectivation.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 959-975.

Catherine Chabert : De l’acte à la scène. Le psychodrame avec les adolescents

À partir d’une critique du terme « conduites addictives », l’auteur propose une réflexion métapsychologique centrée sur la compulsion de répétition et sur ses effets à l’adolescence, plus précisément dans les pathologies anorexiques. L’étude clinique du processus thérapeutique déployé au psychodrame dans le traitement d’une adolescente gravement anorexique, s’articule autour de constructions théoriques à propos de la dialectique des perceptions internes et externes. La question essentielle se pose quant au surinvestissement des perceptions externes – constitutif du narcissisme – au détriment  des perceptions internes. Celles-ci sont considérées comme intrinsèquement liées aux affects qui constituent la « matière  première » du transfert.

La seconde partie de l’article est consacrée au psychodrame analytique, à son intérêt et à ses fonctions, en de telles situations : fragmentation du transfert, jeux de doubles, et mise en mots des affects offrent autant de moyens pour traiter la violence  pulsionnelle dans la mesure où la méthode assure la liaison entre les images et les mots, lorsque les affects sont barrés, emprisonnés voire étouffés. Ainsi le psychodrame trace le chemin de l’expérience effective de l’effondrement, dans son double versant, témoin de la détresse originaire et de la solitude œdipienne.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 941-957.

Anna Maria Nicolò : Une ou plusieurs anorexies

L’auteur observe que, sous la dénomination unique d’anorexie, il existe en réalité des structures de la personnalité et des tableaux psychopathologiques différents. Elle décrit également l’évolution de la composante anorexique chez une femme adulte, traitée par l’analyse après avoir apparemment surmonté le symptôme et la dynamique anorexiques.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 925-940.

Christian Mille, Daniel Sibertin-Blanc : De « l’adolescent inconsommable » à « l’adolescence inconsommable »

Un tel titre, pour le moins énigmatique, impose le recours au dictionnaire pour en dégager quelques significations potentielles. En s’appuyant sur les différentes définitions proposées, quelques axes de réflexion se dégagent pour les praticiens qui essaient parfois vainement d’attirer et de fidéliser les adolescents dans leurs « fonds de commerce ». Il existe bien une expression clinique de « l’adolescent inconsommable », tout du moins jugé comme tel par ses proches et qui se soustrait pareillement à toute forme d’appétence psychothérapique à son égard. La fantasmatique du sujet/objet consommable qui sous-tend cette stratégie d’évitement mérite d’être explorée. Dans les situations les plus préoccupantes, elle vient trahir une adolescence inconsommable par refus du corps sexué ou du devenir adulte. La question ultime étant celle du dispositif psychothérapique tolérable pour un adolescent sur ce registre.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 861-876.

Daniel Sibertin-Blanc, Christian Mille : l’adolescent inconsommable face au désir parental de le consommer…

L’adolescent inconsommable concerne une population nombreuse d’adolescents en prise avec des parents qui abusent de leur pouvoir en les exploitant au point de nier leur statut de sujet. Parmi ces adolescents beaucoup sombrent dans des conduites autodestructrices pour épargner leurs parents auxquels s’adresse fondamentalement leur violence. D’autres échappent à cette contrainte et parviennent à préserver le processus de subjectivation. Ils indiquent que des solutions sont possibles pour aider les premiers à devenir inconsommables.

Adolescence, 2008, T. 26, n°4, pp. 851-859.