La « radicalisation » émerge dans le discours parental comme motif de consultation pour leurs adolescents. Dans les trois situations cliniques, elle apparaît comme un médiateur utilisé par les adolescents pour se séparer et combler un vide dans la transmission transgénérationnelle. Le « métissage traumatique » sera discuté comme opérateur dans le processus identitaire. L’objectif est de comprendre le sens de ces engagements radicaux, dans le contexte de séparation-individuation.
La tragédie, née à Athènes au Ve siècle av. J.-C., est caractérisée par la représentation de la nature problématique de la réalité. À l’adolescence, la résolution de l’énigme de la sexualité permet d’investir l’idée que des forces conflictuelles déterminent le comportement des hommes. En découvrant la dimension tragique de l’existence, l’adolescent peut reconnaître les manœuvres perverses où du registre de l’ambigüité on passe à celui de la paradoxalité, et s’engager dans une action de dénonciation.
Sur la base d’une expérience sensible et prolongée au contact de patientes-détenues « radicalisées », l’affiliation idéologique jihadiste est envisagée comme seul recours pour ces jeunes femmes de panser les blessures d’une histoire familiale accidentée. Une fois captivées par cette dogmatique idéaliste, elles semblent dépossédées de leur activité de pensée et de l’essence même de leur subjectivité, jusqu’à fusionner avec l’idéal sacré et la doctrine radicale.
Adolescence, 2018, 36, 2, 243-252.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7