The intrinsic content of the work the Golden Pavilion is analyzed from a psychoanalytical perspective. The correspondences between the novelist Mishima and the young hero Mizoguchi are only alluded to ; the author concentrates more on explaining why the young adolescent, received as a novice in the monastery of the « Golden Pavilion », comes to make the criminal decision to burn the famous temple. The vagaries of the construction of the ego in the pre-Oedipal and Oedipal phases, and the hero’s difficulty in finding a place as a desiring subject are examined. The central question has to do with the peculiar status of the Golden Pavilion within the hero’s psychical economy : reality, fantasy, hallucination, or endo-psychical object ?
Archives de catégorie : Attaques du corps – 2004 T. 22 n°2
Christine Condamin-Pouvelle : l’héritage mortifère du pavillon d’or
Le contenu intrinsèque de l’œuvre du Pavillon d’Or est analysé dans une perspective psychanalytique. Les correspondances entre le romancier Mishima et le jeune héros Mizoguchi ne sont que suggérées, l’auteur s’attachant davantage à expliquer pourquoi le jeune adolescent, accueilli comme novice en formation dans le monastère du Pavillon d’Or, est amené à la décision criminelle d’incendier le célèbre temple. Les aléas de la construction du moi lors des phases préœdipienne et œdipienne et la difficulté pour le héros de trouver une place de sujet désirant sont étudiés. La question centrale porte sur le statut particulier du Pavillon d’Or dans l’économie psychique du héros : réalité, fantasme, hallucination ou objet endopsychique ?
Gérard Bonnet : le trouvère. Quand la rivalité des doubles tourne à l’atteinte du corps propre
L’adolescent qui s’en prend à son propre corps est souvent enfermé dans une logique des doubles dont il cherche à se protéger et à émerger. Celle-ci présente l’avantage de maintenir l’illusion de toute-puissance éprouvée quand il était enfant, de la projeter en l’autre avec la violence qui l’accompagne, et de fixer cette dernière en la retournant sur soi de façon ciblée et limitée. Les automutilations qu’il s’inflige constituent ainsi des témoins réels de l’illusion dont il a besoin pour se construire. L’intérêt d’une œuvre comme Le Trouvère de Verdi est de nous faire accéder au scénario mythique sous-jacent à ce type de comportement et d’ouvrir la voie à son analyse. On y découvre en particulier comment l’automutilation constitue chez certains adolescents un rite de passage grâce auquel ils s’affrontent à un double mythique, d’abord à leurs dépens, mais en gardant aussi la possibilité de le démasquer.
Olivier Douville : attaques contre le corps ou retour au geste
Une clinique de l’automutilation à l’adolescence est possible à la condition de situer l’adolescent comme étant dans une crise phénoménale entre deux corps. Non seulement le corps enfantin et le corps adulte, mais surtout entre le corps des pulsions partielles et le corps phallicisé. La scène des origines du corps humain est psychiquement retrouvée, recréée à ce moment-là. L’auteur fait le pari que la lecture des échanges entre Caillois et Bataille permet d’entrevoir ce qu’est la tension adolescente dans sa subjectivation du corporel.
Jacques Maître : l’automutilation comme retour du religieux ?
L’objet de cette contribution est de repérer dans l’histoire du catholicisme des éléments dont l’écho peut se détecter quand nous analysons les automutilations adolescentes actuelles au sein de la société française. Pour l’Antiquité, on trouve la référence au martyre comme modèle d’ascèse ; pour le Moyen Âge, l’avènement du Christ gothique. Le rapprochement entre les textes anciens et les données actuelles de la clinique prendra tout son relief à la lecture des messages échangés au sujet des automutilations par les jeunes qui s’expriment sur les forums d’Internet.
L’héritage du passé catholique peut se lire dans les pratiques de flagellation, illustrées par les mortifications que s’infligeaient au XVIIe siècle Marie de l’Incarnation et son fils dom Claude Martin. Nous trouvons aussi l’inscription corporelle des stigmates de la Passion et l’anorexie mystique ; celle-ci préfigure, dans le cadre de la virtuosité mystique catholique, l’anorexie mentale qui en fournit une version sécularisée, tenue maintenant pour une des pathologies majeures de l’adolescence. Le lien entre les automutilations adolescentes et l’anorexie est bien connu en épidémiologie.
Dans le champ de la « post-modernité », les pratiques scarificatoires se rattachent d’une certaine façon au catholicisme médiéval à travers des courants tels que le « ghotik », notamment quand le chanteur Marylin Manson utilise comme emblème le tableau de Grünewald représentant la Crucifixion d’une façon quasi expressionniste. Les propos des jeunes qui s’adonnent à ces pratiques montrent une volonté de fuir un monde inhabitable. Il faut cependant bien distinguer les différents cadres institutionnels où vivent ces adolescents : famille, foyers d’accueil. En milieu carcéral, ce sont même des adultes qui s’infligent des scarifications et des brûlures pour « faire avec » leur détresse existentielle.
Enfin, cette réflexion aboutit à une question chère aux médias : assistons-nous à un « retour du religieux » ? Il s’agit au contraire d’une déperdition radicale de l’emprise exercée sur la population française par ce qui fut le « religieux » dominant d’autrefois, l’Église catholique. Le dogme sans cesse réaffirmé par le Magistère se trouve en manque croissant de crédibilité, ce qui permet d’en réemployer des éléments épars sans aucune adhésion au système dogmatique, comme on le voit avec la mode actuelle des relations personnelles avec l’ange gardien. Il en va de même avec le satanisme des jeunes gothiques. D’ailleurs, nous n’aboutissons pas à des cérémonies instituées, mais à des rituels privés qui constituent un cri de souffrance en appelant au paradis d’une écoute chaleureuse.
Philippe Givre : l’autosabotage : mode d’être adolescent
Au-delà d’une simple conduite psychopathologique, l’autosabotage, dans l’acceptation que lui donne Jeammet, reflète le maintien d’une situation de dépendance et traduit un échec des processus psychiques internes à aménager la relation. Ainsi, via ce langage comportemental ou néo-langage, l’adolescent cherche à créer une néo-identité capable de compenser le déficit des processus d’intériorisation et du même coup à juguler la présence de failles narcissiques que les processus adolescents auront mis à jour par la quête de sensations.
L’autosadisme sous-jacent à l’autosabotage repose, de fait, sur une sorte « d’auto-érotisme compensateur » qui est aussi un auto-érotisme pétrifié ou perverti pour devenir comme dans les addictions, purement machinal et autodestructeur en favorisant notamment la désobjectalisation de ces conduites qui vont alors s’ériger en mode d’être ; un mode d’être qui instaure le goût de la déréliction en lieu et place de la dynamique désirante.
Dominique Agostini : le concept de « saboteur interne » selon w. r. d. fairbairn
Ce texte explore « la situation endopsychique de base » décrite par Fairbairn. Cette situation est celle d’un « moi » clivé. C’est-à-dire d’une position schizoïdale que Fairbairn considère comme centrale et base de sa théorie de la structure mentale. La « situation endopsychique de base » est composée de trois structures du « moi » qui bien que correspondant grossièrement à la tripartition freudienne, sont conçues comme des structures du « moi » intrinséquement dynamiques les unes par rapport aux autres. C’est la structure moïque anti-libidinale ou « saboteur interne » qui occupe la position centrale de ce texte.
Haouri Maïdi : passion et adolescence
Passion et adolescence évoquent toutes deux la problématique de la démesure, l’excès et l’extrême, le trop du trop. L’amour est ici insensé et insupportable, lié au besoin de l’autre plutôt qu’à l’expression du désir. Aussi, au-delà de l’exigence d’emprise sur l’autre cause du besoin, rencontre-t-on chez le sujet passionnel un sadomasochisme intrasubjectif agi et de fréquentes conduites autodestructrices (autosadisme). Ici, la victime et le bourreau sont particulièrement fondus et amalgamés.
Pablo Votadoro, Richard Rechtman, Sarah Stern : l’angoisse contagieuse
Le processus adolescent donne parfois lieu à une angoisse de disparition, d’anéantissement, qui a comme caractéristique principale d’être partageable, voire d’être contagieuse pour l’entourage. Dans ce cas, elle se met en scène en prenant le plus souvent comme protagoniste principal le corps.
Didier Drieu : automutilations, traumatophilie et enjeux transgénérationnels à l’adolescence
Si les automutilations rendent compte de stratégies paradoxales pour faire taire les excitations pubertaires à l’adolescence, elles viennent aussi témoigner de tendances traumatophiliques à l’œuvre dans un contexte de filiation narcissique. L’histoire du cas de Théo nous montre l’importance qu’il y a à reconnaître les liens d’interdépendance entre les parents et le jeune adolescent face à ces enjeux transgénérationnels. En effet, la problématique sous-jacente dans ces conduites ne semble pouvoir s’élaborer que dans la mise en perspective des tensions traumatiques qui fondent l’indifférenciation et la violence dans les liens intergénérationnels.