À partir tant de la biographie que de l’œuvre poétique et des lettres d’Afrique d’A. Rimbaud, l’auteur propose trois hypothèses : premièrement, dans une première partie de sa vie, celle poétique, l’écriture de Rimbaud lui servit de déflexion et réfraction à la psyché afin de créer un espace tiers que le père ne sut/put occuper face à l’omniprésence maternelle. Dans la deuxième partie de sa vie se fut la vie en Afrique, lieu où avait vécu le père et « le droit de s’en aller » (Baudelaire) qui servirent cette « modalité déflexive », forme de « subjectivation-action » qui est le propre de l’adolescence. Deuxièmement, nombre de pièces poétiques d’A. Rimbaud furent, comme P. Aulagnier le montra ailleurs, autant de projections d’une reconstruction du passé sur l’avenir, opérations indispensables au narcissisme adolescent. Troisièmement, le mouvement mélancolique propre à la construction subjective adolescente trouve dans l’écriture poétique (génialement chez A. Rimbaud et habituellement chez les autres pubères, y compris dans les chansons) un objet évanescent et toujours à retrouver, compulsionnellement, dans et par un « travail d’écriture » confrontant celui-ci au « travail de mélancolie » de l’objet primaire perdu.
Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 913-926.