Archives par mot-clé : Sociologie

Muriel Darmon : variations corporelles. l’anorexie au prisme des sociologies du corps

En adoptant le regard particulier qu’offre la sociologie du corps, cet article replace les attitudes et comportements anorexiques dans l’espace social des représentations et usages du corps. L’étude des « variations corporelles » (selon les époques de l’histoire, les classes sociales, les classes d’âge et le sexe) permet de voir se profiler, derrière le corps anorexique, un modèle corporel situé historiquement et socialement, qui est tout à la fois contemporain, adolescent, féminin, et d’origine sociale moyenne ou supérieure. En outre, le processus de transformation corporelle qui se joue au cours de la carrière anorexique entre en résonance avec des représentations contemporaines de la malléabilité corporelle. Il en manifeste notamment deux figures pourtant opposées, celle d’un corps « mou », perçu comme labile et modifiable à l’envi, et celle d’un corps « dur », qui tend à « persévérer dans son être » et à résister à toute injonction au changement.

Jacques Dayan : l’autonomie comme valeur

L’idée que le concept de responsabilité de Soi s’impose depuis plusieurs décennies comme représentation dominante de la relation de l’individu au socius est discutée. Une des principales hypothèses avancées par l’auteur est que la – relative – irresponsabilité de Soi était associée à l’étendue de la délégation de sa propre protection à l’État. Ces modifications feraient écho aux transformations socio-économiques et traverseraient, nous l’évoquons, le champ des sciences humaines. Elles se manifestent, concernant la psychanalyse, par une évolution de la plainte et un accent porté sur les troubles « narcissiques ». Il reste incertain que ces transformations affectent de façon consistante le comportement adolescent au-delà du rôle que celui-ci semble avoir régulièrement joué : celui d’un intégrateur social, d’un passeur entre les générations.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 609-614.

Alain Ehrenberg : la société du malaise. une présentation pour un dialogue entre clinique et sociologie

Le « malaise dans la société » est moins un point de départ de l’analyse sociologique qu’un problème à élaborer et à clarifier. L’auteur propose de remplacer l’idée individualiste que la société cause des souffrances psychiques par l’idée sociologique que la souffrance psychique est aujourd’hui une forme d’expression obligatoire, c’est-à-dire attendue, du mal social. Cela le conduit à l’hypothèse qu’avec la santé mentale, on assiste à une généralisation de l’usage d’idiomes personnels pour donner forme et résoudre des conflits de relations sociales. Ces jeux de langage consistent à mettre en relation malheur personnel et relations sociales perturbées à l’aune de la souffrance psychique, unissant ainsi le mal individuel et le mal commun. À partir de là, il développe l’hypothèse que, brouillée dans le malaise, se joue une crise de l’égalité à la française, c’est-à-dire d’une égalité conçue essentiellement dans les termes de la protection, et une protection en termes de statut, sur le modèle de la fonction publique, alors que l’égalité d’aujourd’hui, et donc la lutte contre les inégalités sociales, se joue dans les termes de la capacité.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 553-570.

Rémy Potier : vérité et illusion des approches croisées entre psychanalyse et neurosciences. entretien avec roland gori

Les approches croisées entre neurosciences et psychanalyse sont de plus en plus défendues sur le plan méthodologique. À l’occasion de ce numéro de la revue Adolescence, Rémy Potier interview Roland Gori à propos de l’heuristique de ces nouvelles recherches. La rigueur conceptuelle semble souvent faire défaut à ces approches qui ne se soucient pas suffisamment de la polysémie des concepts comme des enjeux sociaux-historiques.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 531-544.

Jacques Dayan : comprendre la délinquance ?

Délits et crimes sont selon É. Durkheim des acceptions issues de la conscience commune.  Mais comment se forge et se transmet cette conscience ? Qu’est-ce que l’acte délictueux ?  Tout acte antisocial relève-t-il d’une pathologie ? Existe-t-il une épistémologie commune aux champs sociologique et psychologique ? Nous tentons de répondre à ces questions et à leurs implications dans le champ de la justice des mineurs et des soins aux délinquants.

Adolescence, 2013, 30, 4, 881-917.