Archives par mot-clé : Dépression

Michèle Bertrand : à propos des traumas de guerre

Il convient de considérer le trauma et le traumatisme dans une perspective dynamique, à savoir comme quelque chose qui se poursuit et se transforme dans la durée. Ainsi, le PTSD (Post traumatic Stress disorders) a une portée limitée, parce que statique, et ne relevant que des symptômes d’un certain type. La notion de résilience, récemment promue, entérine ce point de vue dynamique. L’adolescent peut présenter des troubles qui ne relèvent pas de ce qu’il est convenu d’appeler la névrose de guerre, mais apparaissent comme plus graves et préoccupants.

 

Michael Stora : addiction au virtuel. le jeu vidéo

 

Le phénomène du jeu vidéo implique d’en étudier aussi les risques. Nous avons choisi de l’aborder sous l’angle de la dépendance, certains sujets y jouant de manière excessive. Nous tenterons de voir en quoi le choix de l’objet d’addiction “ jeu vidéo ” est révélateur d’une histoire faite de blessures narcissiques autour des images réelles mais aussi des images de soi. Le jeu vidéo nous montre la lutte anti-dépressive mise en place par le joueur à travers un avatar, double narcissique possédant les talents anaux qui lui font cruellement défaut.

François Richard : travail de représentation et processus psychotique

Dans cet article est faite l’hypothèse que le processus de subjectivation, en particulier à l’adolescence, recourt à la fermeté d’un style, qu’il soit de posture personnelle ou artistique, lorsque le sujet est menacé par des attaques psychotiques. On le voit alors intensifier son travail de pensée et de représentation, mais on distingue alors difficilement l’excès de conscience mélancolique, l’angoisse psychotique et un type de sublimation fasciné par le chaos pulsionnel. Une seconde hypothèse est faite concernant, à l’inverse, l’utilité d’une certaine solitude et de compromis masochistes avec l’objet et la réalité.

Un moment de crise d’allure psychotique chez une adolescente relevant d’une problématique névrotique est présenté dans la mesure où la quête de la singularité d’un style y endigue la décompensation.

Le théâtre de l’auteur dramatique S. Kane est ensuite analysé en détail, en effet on y trouve de façon exemplaire le paradoxe d’un suicide succédant à une maîtrise représentationnelle réussie.

Sont enfin discutées les propositions de Freud sur la destructivité masochiste et celles de D. W. Winnicott sur le noyau du vrai Self comme non-communication.

Vincent Cornalba : vivre avec

L’auteur envisage la figure de l’ami dans son rôle d’attracteur vis-à-vis du registre de la dépression à l’adolescence. À la fois pris dans une perte d’objets et dans la perte d’un état, qu’il lui faut à présent subjectiver, l’adolescent trouverait en la personne de l’ami cet acteur – à la fois agent facilitateur, sujet d’expérience et support projectif et/ou d’identification – susceptible de le soutenir efficacement dans ce travail qui concerne, d’une manière essentielle, le registre de la rencontre.

 

Claude Savinaud : le “ roc du féminin ”, point de butée de la sexualité adolescente

L’abus sexuel dans un cadre intrafamilial de certains auteurs adolescents semble démontrer une difficulté à discerner ce qu’il en est du féminin dans l’objet maternel. Notre propos s’attachera à étudier ici spécifiquement ce facteur :

– L’acte correspond à un “ lâchage ” de la protection assurée à l’enfant par l’image maternelle et/ou la surenchère de l’appropriation du corps ou de la psyché de l’adolescent à des fins de jouissance ou d’objet d’angoisse.

– L’acte répond à un trou dans le système des représentations symboliques délimitées par la loi, ce trou concerne le “ roc biologique ” de la castration, dont la différence des sexes est un signal d’appel.

 

Yvon Brès : solitude : bouderie

Les souffrances de la solitude, qu’on lie en général à l’isolement, mais qui sont aussi de nature dépressive, pourraient être rattachées à cette conduite – infantile et adulte – de bouderie, laquelle consiste à feindre certains types de souffrance afin d’exercer un chantage sur autrui.  La bouderie a des effets physiologiques nocifs ; elle comporte aussi des bénéfices secondaires (particulièrement visibles chez le Rousseau des Rêveries du promeneur solitaire) ; elle risque enfin de déclencher des refoulements entraînant la disparition de son sens et transformant une conduite « voulue » en un ensemble de symptômes subis. La restitution du sens originaire de cette conduite pourrait fournir des arguments à une psychanalyse qui insiste sur la dimension du « sujet ».

Jacques Dayan : depressiveness and depression

There is a tendency in the systemic psychiatry of mental states to consider periods of sadness or persistent discouragement in the adolescent, or even just morose states, as signs of pathology. Following the theories of D. W. Winnicott, E. Gut, P. Fédida and Ph. Gutton, we develop the dynamic viewpoint according to which the depressive movement that is inherent to mental life plays a part in the regulation of psychical life. Set in motion by loss or abandonment, it fosters the redistribution of investments, a veritable « re-affectation ». The depressed adolescent subject needs to be accompanied, not immediately treated. Although the outcome of adolescent depressiveness is usually favorable, we will examine some possible harmful outcomes, calling depression in such cases « unproductive », « death depression » or « depression of unbinding ». Two emblematic pathological figures, mental anorexia in the young girl and addictive conducts, are seen as resistances to depressiveness, which is nonetheless a key part of a process of integration. These illustrate, following the example of the dismantling of thought in psychotic depressions – desperately expressed in artistic productions – the essential role that the body plays as a constituent and a means of psychical life.

revue Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 737-745.

Jacques Laget : cuts, painting with the blood, glance of the therapist

During a session of psychotherapy, Benoît, 15 year-old, asks if he can make a painting of his blood – painting which he realizes then, at home, and describes in the following session : the eyes of Horus, which he found on internet. He presents a severe depression and projects of suicide, he cuts himself, the narcissistic fragility is massive and the identical problem in the foreground. Benoît claims his depression, says his fascination for its scars, he assimilates his need to see pouring his blood as a dependence with a drug. He wants to cut himself, he needs it, he feels existing. The blood relationships unite him strictly to her twin sister. He says that he does not suffer when he cuts himself, He undergoes in adversity, he feels and paradoxically hardens… The pain strengthens him and there even strengthens the limits of the ego. He so treats his excess big sensibility, signs for him of weakness and passivity which we set against the violence, the power and the strength which he feels in his auto-aggressive behavior.

Glances : his on his blood and painting. The place of the glance, the glances, the eyes of Horus, internal glance of Benoît on his blood which pours, his scars, trying to appropriate a body and a psyche which change and threaten it. Glance of his parents who suffer, he knows that, bewildered, they panic at the beginning, but their glances evolve. Glance of the therapist on his painting, as « adolescent » creation, and resumption of the myth in the therapy. The therapist, the psychotherapy of the attacks of the body, restore a relationship associating creation and representation, opening in the sense.

Adolescence, 2011, T. 29 n°2, pp. 355-383.

Jacques Dayan : dépressivité et dépression à l’adolescence

Une tendance à la psychiatrisation systématique des états mentaux conduit à considérer les périodes de tristesse et de découragement persistants de l’adolescent, voire les seuls états de morosité, comme des figures de la pathologie. Nous développons avec D. W. Winnicott, E. Gut, P. Fédida et Ph. Gutton, le point de vue dynamique selon lequel le mouvement dépressif, inhérent à la vie mentale, participe à la régulation de la vie psychique. Mis en jeu par la perte ou l’abandon, il favorise la redistribution des investissements, véritable « ré-affectation ». Le sujet adolescent déprimé nécessite d’être accompagné, non d’être d’emblée soigné. Bien que l’issue de la dépressivité adolescente soit le plus souvent favorable, nous en examinons certains destins dommageables, qualifiant la dépression de « non productive », de « dépression de mort » ou de dépression de déliaison. Deux figures pathologiques emblématiques, l’anorexie mentale de la jeune fille et les conduites toxicomaniaques, sont envisagées comme résistance à une dépressivité, pourtant élément clé d’un processus d’intégration. Elles illustrent, à l’instar du démantèlement de la pensée dans les dépressions psychotiques – désespérément exprimé dans des productions artistiques – le rôle essentiel que joue le corps comme constituant et moyen de la vie psychique.

Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 737-745.