Archives par mot-clé : Délinquance juvénile

Aboubacar Barry : modernité africaine et enfants des rues

En Afrique Noire, les transformations actuelles des structures sociales et le déficit des outils culturels de symbolisation et d’intégration produisent des déchets familiaux condamnés à errer dans les rues des grands centres urbains. Ces enfants de la rue viennent prendre la place de ce qui doit être mis aux bornes du groupe d’appartenance pour que celui-ci puisse fonctionner comme communauté, de ce qui doit être mis dehors pour qu’un dedans puisse se constituer. Tout comme si l’espace de l’exclusion et de la transgression se déployait à l’intérieur même de l’espace habité, mais dans ses lieux de passage, ou du moins dans ce qui ne devrait être que des lieux de passage et d’échange.

Caroline Gimenez, Catherine Blatier, Martine Paulicand, Ondine Pez : délinquance des filles

 

En criminologie, la délinquance et la criminalité sont décrites comme des activités essentiellement masculines ; c’est là le constat qui ressort de nombreuses études. En outre, la majorité des recherches ayant tenté d’appréhender le phénomène délinquant se sont basées sur des échantillons de garçons et/ou d’hommes. De fait, peu de données sont disponibles sur la délinquance des filles. Notre étude propose un état des lieux de l’activité délictueuse d’un échantillon mixte de 241 mineurs, 168 garçons et 73 filles, vivant dans les agglomérations de Gap et de Grenoble.

Michel Botbol, Luc-Henry Choquet : éduquer et transmettre. changement et continuité de la transmission dans le contexte de la justice des mineurs

Le défaut de transmission des valeurs, et notamment celles qui sont liées à la notion d’autorité, est souvent évoqué comme un facteur déterminant de la délinquance des mineurs. C’est sur cette base que les gouvernements successifs ont pris, depuis 1998, des initiatives qui tendent à donner plus de place à la contrainte et à la sanction dans le traitement judiciaire des mineurs délinquants. Cette position heurte les représentations des professionnels de la justice des mineurs qui voient dans cette évolution une remise en cause radicale des valeurs qui leur ont été transmises. À partir de la lecture qu’ils font de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante, ils considèrent qu’il s’agit là d’une rupture radicale dans les missions de cette justice spécialisée que ces nouvelles orientations feraient passer d’un modèle protectionnel à un modèle répressif obligeant aux dégagements de valeurs contraires à celles sur lesquelles ils avaient fondé leur engagement professionnel.

Cet article reconsidère cette présentation de la question et cherche à mettre en exergue ce qui fait pourtant transmission et continuité au sein de ce mouvement. Pour ce faire, il  procède à une relecture de l’ordonnance et de son exposé des motifs et examine la question en remettant en cause les  modèles psychologiques et psychiatriques sur lesquels s’appuient les tenants de la rupture pour la  démontrer. Cette relecture fait notamment apparaître que c’est l’évolution des représentations de l’ordonnance, et non cette ordonnance elle-même, qui ont conduit à faire l’impasse sur les dimensions répressives et contraignantes qu’elle contient ; elle fait également apparaître que c’est à partir d’une représentation très limitée du thérapeutique (essentiellement celle d’une clinique limitée au modèle de la psychothérapique individuelle) que s’est forgée la conviction classique que la justice des mineurs souffre d’une  influence excessive de la clinique qui s’opposerait à la primauté de « l’impératif éducatif ». C’est donc bien le modèle éducatif de l’aide contrainte qui a toujours été promu par l’ordonnance de 45 contrairement à ce qu’a pu laisser penser la lecture classique qui en a été faite.

En se référant à la dynamique des adolescents difficiles, les auteurs considèrent que le modèle éducatif associant aide et contrainte est celui qui est le plus apte a prendre en compte les besoins éducatif et thérapeutique de ces jeunes. En remettant en cause la rupture que certains mettent en avant, ils défendent l’idée qu’il importe d’asseoir la transmission des valeurs éducatives de la justice des mineurs sur la transmission de ce modèle qui, dans ces conditions, n’exige pas de remettre en cause une tradition clinique valorisée, dès lors qu’elle est elle aussi conduite à adapter son modèle et ses pratiques aux particularités psychopathologiques des adolescents suivis dans ce contexte.

Adolescence, 2009, T. 27, n°2, pp. 355-374.